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RÉSULTATS

Le raz-de-marée de la NCAA

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BUFFALO – Depuis que la National Collegiate Athletic Association (NCAA) permet aux joueurs de la Ligue canadienne de hockey (LCH) de joindre ses rangs à la suite d'un changement de réglementation adopté en novembre dernier, une boîte de Pandore s'est ouverte. Le nombre de défections attendues vers les États-Unis est simplement ahurissant.

À ce jour, près d'une quarantaine de joueurs de la Ligue de hockey junior Maritimes Québec (LHJMQ), près d'une soixantaine de la Ligue de l'Ontario (OHL) et environ soixante-dix de la Ligue de l'Ouest (WHL) ont déjà ratifié leur passage vers les rangs universitaires américains.

Il faut cependant absolument prendre le temps de relativiser ces données, puisqu'une écrasante majorité de ces athlètes en était à sa dernière campagne dans les rangs juniors canadiens et n'a jamais été repêchée par une équipe de la Ligue nationale de hockey (LNH).

Entre autres exemples, il y a celui de l'attaquant de l'Océanic de Rimouski et meilleur pointeur de la LHJMQ en saison régulière Jonathan Fauchon, qui évoluera avec Providence College après cinq années passées avec l'Océanic et l'Armada de Blainville-Boisbriand.

Dans ce cas précis, ce sont davantage les formations des rangs universitaires canadiens qui sont sévèrement pénalisées, étant donné que les Québécois avaient l'habitude de poursuivre leur carrière avec les Stingers de Concordia, les Redbirds de McGill, les Patriotes de l'Université du Québec à Trois-Rivières ou encore les Aigles Bleus de Moncton.

Cela dit, quelques joueurs de la LCH ont annoncé qu'ils quitteront le circuit MacKenzie, même s'ils pouvaient y évoluer encore une ou plusieurs saisons. Parmi ces athlètes qui appartiennent déjà à des équipes de la LNH, le nom le plus connu est certainement celui de l'espoir des Blue Jackets de Columbus Cayden Lindstrom, qui portait les couleurs des Tigers de Medicine Hat. Le centre s'alignera désormais avec les Spartans de Michigan State.

Au Québec, le dossier de l'attaquant du Drakkar de Baie-Comeau Justin Poirier a fait grand bruit, parce que c'est à la demande des Hurricanes de la Caroline que le choix de 5e ronde rejoindra les Black Bears du Maine. La décision a d'ailleurs été mal reçue par Baie-Comeau.

Le commissaire de la LHJMQ Mario Cecchini a tenté de calmer le jeu plus tôt cette semaine en affirmant qu'il ne s'attend pas à un possible exode des joueurs de son circuit vers le sud de la frontière dans un avenir plus ou moins rapproché, mais reste que le sujet était sur toutes les lèvres cette semaine à la Séance d'évaluation des espoirs de la LNH à Buffalo.

D'autant plus que Cole Reschny et Malcom Spence, qui n'appartiennent pas encore à des équipes de la LNH, ont récemment décidé de plonger. Les deux attaquants ont avoué que tous les joueurs présents à la Séance d'évaluation étaient très intrigués par leur décision.

« Tout le monde avait des questions, a déclaré Reschny, qui jouera avec les Fighting Hawks de North Dakota. Tout le monde voulait savoir pourquoi je l'ai fait et quel est le processus. J'ai également été très honnête avec les équipes que j'ai rencontrées. J'ai tout expliqué. »

« Les joueurs se posent énormément de questions sur le processus de transfert vers les universités américaines, a quant à lui ajouté Spence. C'est certain qu'il va y avoir beaucoup de changements après le repêchage. Là où les joueurs aboutiront nourrira leur réflexion. »

« J'ai l'intention de retourner avec les Rangers de Kitchener, mais si l'équipe de la LNH qui me repêche à une opinion différente, je devrai la prendre en considération, a reconnu le défenseur Cameron Reid. Mais pour le moment, je ne vois aucune raison de quitter les Rangers. Je me développe très bien et je m'entends à merveille avec tous mes entraîneurs. »

Tous les joueurs interrogés à ce sujet ont unanimement évoqué que les rangs universitaires américains sont le circuit qui sied peut-être le mieux à leur développement. Il n'a jamais été question d'argent ou bien de la possibilité de décrocher un diplôme d'études universitaires.

« Je donnerai à mon corps et à mon esprit le temps qu'il faudra pour se développer. Je pourrai également travailler sur certains aspects de mon jeu, a précisé Reschny. Ç'a été une décision extrêmement difficile à prendre, mais c'était la meilleure dans les circonstances. »

« L'aspect physique a été pris en considération. Il faut que je gagne en muscles en vue de la LNH, a continué Spence, qui mesure 6 pieds 1 pouce et pèse 203 livres. Je prends toujours mes décisions avec l'objectif de faire progresser ma carrière. Il s'agit d'une nouvelle vague. »

Ainsi, rares sont ceux qui se sont insurgés contre l'idée de quitter son équipe junior pour les rangs universitaires américains, mais cela a été le cas de l'attaquant des Silvertips d'Everett Carter Bear. À ses yeux, il aurait la vive impression de laisser tomber tous ses coéquipiers.

« C'est une question de loyauté, a martelé Bear. La loyauté fait partie de mes valeurs et c'est pourquoi je veux demeurer ici. Je crois que ce sentiment est partagé par tous [à Everett]. La loyauté fait partie de notre identité. Nous voulons terminer ce que nous avons commencé. »

« J'ai parfois l'impression qu'il s'agit d'un nouveau jouet pour certains joueurs, a analysé le directeur général des Silvertips Mike Fraser en entrevue à RDS.ca. Mais c'est certain que si un joueur me dit que c'est ce qu'il y a de mieux pour lui, c'est difficile de contre-argumenter. Mais bon, nous n'avons pas encore toutes les données pour porter un jugement éclairé. »

Fait intéressant à noter, ces enjeux existentiels n'ont pas traversé l'Atlantique. Les espoirs suédois Anton Frondell et Victor Eklund n'envisagent même pas de jouer dans la LNH la saison prochaine, préférant plus que jamais faire la pluie et le beau temps avec Djugarden.

« La Suède est un superbe endroit pour se développer et tout le monde aspire à jouer un jour pour l'équipe de sa ville, a expliqué l'attaquant suédois de l'équipe junior de Djugarden Arvid Drott. Je suis né à Stockholm et mon père a toujours été un partisan de Djugarden. »

Il n'y a pas un chemin unique qui mène à la Ligue nationale de hockey, mais il faut faire preuve d'aveuglement volontaire pour croire que les plaques tectoniques ne seront pas appelées à bouger au cours des prochaines années. Le mouvement est déjà commencé.

*Avec la collaboration de Mikaël Filion